Principe de la poursuite des contrats de
travail
L'article L.1224-1 du Code du travail prévoit la poursuite des contrats de travail. Le nouvel employeur est donc tenu de respecter l'ensemble des droits et obligations résultant de ce contrat : ancienneté, droit acquis à congés payés, mais également clauses de mobilité, de non-concurrence, etc. (Cass. soc., 20 oct. 1999, no 97-42.726).
Afin d'éviter toute difficulté quant au contenu exact du contrat de travail, notamment lorsque celui-ci n'est pas écrit, est incomplet ou obsolète, le nouvel employeur peut proposer la rédaction d'un nouveau contrat de travail reprenant les éléments essentiels des contrats en cours.
Si ce contrat n'apporte aucune modification à la situation des salariés autre que le changement d'employeur, ils ne peuvent pas refuser de le signer. Dans le cas contraire, ils peuvent refuser de le signer conformément aux règles applicables à toute modification du contrat de travail (voir no 1310) .
En revanche, le nouvel employeur peut proposer une novation, c'est-à-dire la résiliation du contrat ancien au profit d'un nouveau contrat.
Cette opération est licite, dès lors qu'elle est proposée au salarié qui doit avoir un temps de réflexion pour donner son accord, et qu'elle est exempte de fraude (Cass. soc., 17 sept. 2003, no 01-43.687). SPR 396 p 19
Attention !
Le salarié qui bénéficie d'un logement de fonction de la part de son ancien employeur doit demander à bénéficier d'un avantage comparable auprès du nouvel employeur. L'ancien employeur n'étant plus tenu de lui concéder le logement, il peut lui réclamer une indemnité d'occupation (Cass. soc., 20 mars 1997, no 95-17.470).
Application volontaire de l'article L. 1224-1
Rien n'empêche deux entreprises de faire une application volontaire de l'article L.1224-1 dans les cas où il ne s'applique pas de plein droit (Cass. soc., 17 mars 1993, no 90-41.996), ou encore de signer un accord collectif prévoyant dans quelles conditions s'effectuera la reprise de tout ou partie du personnel en cas de changement de titulaire d'un marché.
L'application volontaire de l'article L.1224-1 peut également être prévue dans un contrat commercial. Dans ce cas, la clause doit jouer à l'égard de tous les salariés concernés par l'activité, même s'ils sont différents de ceux qui étaient initialement visés au contrat (CA Paris, 4 avr. 1997). De même, si l'entreprise qui reprend l'activité fait une proposition de reprise du travail à des salariés qui ne remplissent pas les conditions fixées par l'accord, il y a transfert des contrats de travail pour tous les salariés (Cass. soc., 15 oct. 1996, no 94-42.962).
À noter : certains secteurs d'activité ont organisé conventionnellement le transfert des contrats de travail en cas de reprise d'un marché.
Attention !
Lorsque les conditions d'application de l'article L.1224-1 ne sont pas réunies, les salariés concernés doivent donner leur accord exprès au transfert (Cass. soc., 2 avr. 1998, no 96-40.383). Leur refus ne constitue pas en lui-même une cause de licenciement (Cass. soc., 9 nov. 2005, no 03-45.483).
Usages et engagements unilatéraux
Lorsque le changement d'employeur s'opère en application de l'article L.1224-1 du Code du travail, les usages et engagements unilatéraux sont transférés avec les contrats de travail et sont opposables au nouvel employeur (Cass. soc., 23 sept. 1992, no 89-45.656).
Si celui-ci souhaite les dénoncer, il doit donc informer les représentants du personnel et chacun des salariés concernés, et respecter un délai de préavis entre la dénonciation et la fin de l'application de l'usage afin de permettre une négociation (voir no 1948) .
L'employeur n'est tenu d'appliquer les usages et engagements unilatéraux pris par l'ancien employeur qu'à l'égard des salariés dont le contrat était en cours au jour du transfert (Cass. soc., 7 déc. 2005, no 04-44.594).
Le fait qu'il existe dans l'entreprise d'accueil des accords collectifs ou usages ayant le même objet que ceux transférés ne remet pas en cause ces derniers.
Attention !
Lorsque le repreneur fait une application volontaire de l'article L.1224-1 (voir no 100) , les usages en vigueur dans l'entreprise précédente ne sont pas repris, sauf engagement particulier de la part du nouvel employeur (Cass. soc., 10 oct. 1990, no 87-45.655).
Protection sociale
Retraite complémentaire.
Si l'activité reprise ou poursuivie constitue un établissement distinct et autonome, les différents groupes de salariés peuvent conserver leur caisse et leur taux de cotisation.
En revanche, s'il y a intégration des personnels repris dans une collectivité plus large, le nouvel employeur doit, dans le délai d'un an, opter pour une caisse commune et harmoniser les taux de cotisations. Ces opérations doivent être effectuées pour le personnel cadre et non cadre.
Régime de prévoyance.
Les solutions dépendent de la source juridique qui a instauré un régime de prévoyance dans chacune des entreprises (voir no 2353) .
Lorsque la prévoyance est instaurée par accord collectif ou par référendum, les salariés peuvent prétendre conserver leur prévoyance pendant la durée de survie des accords qui leur étaient applicables, ou peuvent réclamer immédiatement le bénéfice des accords en vigueur dans la nouvelle entreprise.
Si la prévoyance résulte d'un usage ou d'un engagement unilatéral, le nouvel employeur est tenu de l'appliquer sauf à le dénoncer en respectant les formalités prévues (Cass. soc., 21 sept. 2005, no 03-43.532). Toutefois, les salariés peuvent prétendre bénéficier d'un accord ou d'un usage en vigueur dans la nouvelle entreprise s'il est plus favorable.
Enfin, si la prévoyance est incluse dans le contrat de travail non pas à titre purement informatif mais en tant qu'engagement, l'employeur doit en respecter les dispositions ou proposer une modification du contrat de travail (qu'il ne peut pas imposer). Dans cette situation également, le salarié peut demander à bénéficier d'un régime plus favorable en vigueur dans la nouvelle entreprise.
Attention !
Lorsqu'une participation du salarié au financement du régime de prévoyance est prévue, il faut tenir compte du principe selon lequel aucun salarié, employé dans une entreprise avant la mise en place à la suite d'une décision unilatérale de l'employeur d'un système de prévoyance, ne peut être contraint à cotiser à ce système (L. no 89-1009, 31 déc. 1989, art. 11, JO 2 janv. 1990).
Ce principe est applicable aux salariés dont les contrats de travail sont repris par la société qui a absorbé leur entreprise
(Cass. soc., 4 janv. 1996, no 92-41.885).
POUR INFORMATION
Article L.1224-1 Code du Travail
La cessation de l'entreprise, sauf cas de force majeure, ne libère pas l'employeur de l'obligation de respecter le délai-congé et de verser, s'il y a lieu, l'indemnité prévue à
S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société,
tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.