Dans le cadre de son activité professionnelle, un salarié est victime ou auteur d’une infraction (coups et blessures, vol, etc.). Il a besoin d’être assisté par un avocat devant un juge d’instruction ou une juridiction pénale. Qui paie la note ?

 

Le principe

 

Une affaire vécue. Le salarié d’une compagnie d’assurances a fait l’objet d’une plainte pour faux en écritures par un client. L’infraction aurait été commise à l’occasion de l’activité professionnelle. Un juge d’instruction a mis en examen le salarié puis a prononcé un non-lieu. Le salarié s’est fait assister par un avocat dont il a payé les factures. L’employeur refusant de les prendre en charge, le salarié a engagé une procédure prud’homale.

 

Une décision de principe. La Cour de cassation donne raison au salarié. L’employeur doit prendre en charge ses frais d’avocat au motif « qu’investi par la loi du pouvoir de direction et de contrôle des salariés placés sous sa subordination juridique, l’employeur est tenu de garantir ceux-ci à raison des actes ou faits qu’ils passent ou accomplissent en exécution du contrat de travail et qu’il résultait que le salarié avait dû assurer sa défense à un contentieux pénal dont l’objet était lié à l’exercice de ses fonctions »(Cass. soc. 18.10.2006 n° 04-48612) . Les salariés du secteur privé bénéficient donc de la prise en charge des frais d’avocat pour une défense pénale en lien avec leur activité professionnelle à l’instar des agents publics.

 

Bon à savoir. Nous n’avons pas connaissance d’autres décisions de la Cour de cassation sur ce sujet. De l’avis des juristes spécialisés en droit du travail, elle confirmerait ce principe sans hésiter.

 

Attention ! Ce principe s’applique quand bien même le contrat de travail ou le règlement intérieur ou tout autre document stipulerait le contraire. Quelques conventions collectives contiennent des dispositions spécifiques sur les frais d’avocat engagés pour se défendre dans une affaire pénale liée à l’activité professionnelle.

Les applications

Auteur ou victime. Ce principe s’applique pour toute affaire pénale liée à l’activité professionnelle, que le salarié soit poursuivi comme auteur ou complice ou qu’il soit victime (sous quelques réserves, voir « questions non résolues » ci-dessous).

Condamnation ou non. Il est indifférent que le salarié, poursuivi pénalement, soit ou non condamné, ou victime, ou qu’il soit ou non reçu en sa constitution de partie civile.

 

Délégataire ou non. La prise en charge des frais de défense pénale vaut aussi bien pour un salarié titulaire du délégation de responsabilité pénale que pour celui qui n’en a pas.

 

Bon à savoir. Le titulaire d’une délégation de responsabilité pénale est poursuivi à la place du chef d’entreprise en cas d’infraction. Il arrive que le délégataire conteste sa délégation devant le tribunal (aux motifs qu’il n’a pas l’autorité ou les moyens requis ou que le chef d’entreprise s’est immiscé dans sa gestion) pour échapper ainsi à une possible condamnation. Cette défense pénale, qui aboutit finalement à mettre en cause le chef d’entreprise, doit être prise en charge par l’employeur (CA Paris 12.11.2008 n° 07/08432) .

 

Questions non résolues. Ce principe pose toutefois quelques difficultés. Que se passe-t-il quand le salarié a commis une infraction au préjudice de son employeur ? Ou lorsque le salarié s’estime victime des agissements de son employeur ? Autrement dit, l’employeur doit-il assumer à la fois les frais de sa propre défense et aussi ceux de l’auteur de l’infraction dont il est victime ou de celui qui a porté plainte contre lui ? Il y a là quelque chose de choquant qui n’a sans doute pas été souhaité par la Cour de cassation.

 

Les frais de défense pénale d’un salarié, pour des infractions en lien avec l’activité professionnelle, sont des frais professionnels à la charge de l’employeur. Ceci vaut même s’il se défend en remettant en cause une délégation de pouvoirs afin d’échapper (lui mais pas le chef d’entreprise) à une condamnation pénale.

 

Tag(s) : #ACTUALITE JURIDIQUE

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